Le député socialiste Philippe Brun s’est rendu à deux reprises à Bercy en vue d’exercer un contrôle sur place des documents sur l’avenir d’EDF. Le rapport sur l’opération boursière de nationalisation pour 12,5 milliards de l’énergéticien, bientôt présenté au Palais Bourbon, révèle que le projet Hercule de démantèlement d’EDF demeure le scenario principal, contrairement aux déclarations officielles. Ce mardi, il a mis dans l’embarras l’exécutif lors de la séance de questions au gouvernement.
Marianne : Fin octobre, après votre première « descente » à Bercy dans les bureaux de l’Agence de participations de l’État (APE), vous aviez confié à Marianne ne pas être « rassuré sur l’avenir d’EdF » au vu des pièces que le ministère de l’Economie avait été contraint de vous présenter. Votre interpellation du gouvernement sur son projet pour l’énergéticien montre que les documents que vous avez consultés depuis vont tous dans le même sens : le démantèlement ?
Philippe Brun : L’administration n’a pas été en mesure de me fournir une quelconque note formalisant, ni même mentionnant, l’abandon du projet initialement intitulé Hercule et désormais rebaptisé “Grand EDF”. Au contraire, toutes les notes préparatoires à l’opération de montée en capital de l’État que j’ai pu consulter évoquent les futures négociations avec les parties prenantes – comprendre la Commission européenne – sur la régulation du nucléaire et la réorganisation du groupe. Par exemple, la note confidentielle du 27 juin 2022 pose bien comme objectif d’ « engager une filialisation de tout ou partie des activités du groupe liées à la transition énergétique ». Difficile d’être plus clair…
Mais il n’y a pas de scenario alternatif. Aucun ?
Sur les quatre scenarii fixés, tous passent par le démantèlement. Tous mentionnent la cession de 30 % des actifs du groupe relatifs à la transition énergétique, qui n’est autre que l’acte deux du projet Hercule, quand son acte un, c’est-à-dire la montée au capital de l’État dans EDF, est bel et bien le chemin sur lequel nous sommes désormais engagés. Rien n’atteste donc de l’abandon d’Hercule, au-delà du seul intitulé du projet, sinon la parole du ministre Bruno Le Maire.
Est-ce une privatisation qui ne dit pas son nom ?
C’est l’hypothèse la plus probable. Il serait tout à fait possible qu’une fois filialisées les concessions de barrages hydroélectriques et les activités renouvelables, qui ont la plus forte rentabilité, cette filiale fasse appel aux capitaux privés. […]