À peine acheté, son siège social a été squatté durant quatre ans, avec la bénédiction implicite de la mairie de Saint-Denis. L’association sportive n’a jamais pu l’occuper.
Le bâtiment de 700 mètres carrés se trouve au 31, rue Marcel-Sembat. Fin 2012, la FFTri l’achète à la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam). À peine l’acte de vente signé, la FFTri met des architectes au travail. Les travaux d’aménagement doivent commencer à la fin de l’été 2013. Ils ne débuteront jamais car, entre-temps, le 31, boulevard Marcel-Sembat a été squatté.
L’occupant illégal est particulièrement expérimenté. Il s’agit du collectif Attiéké (du nom d’un plat ivoirien), qui milite, pêle-mêle, contre la « rénovation urbaine imposée » de la Seine-Saint-Denis, contre « les profits des entreprises privées » et pour « la régularisation des sans-papiers ». Les pouvoirs publics les ont souvent ouvertement encouragés. À Paris, dans les années 2000, la mairie et le ministère de la Culture soutenaient La Générale à Belleville (19e arrondissement), ainsi que le Théâtre de Verre (10e) ou encore le squat Rivoli (1er).
De la même manière, à Saint-Denis, la municipalité va laisser faire. « On s’est rapproché des élus locaux quand on a été squattés, mais ils n’ont jamais rien fait pour nous aider », déplore un cadre de la FFTri. Et pour cause : la ville y trouve son compte. Au fil des mois, l’Attiéké devient un centre communal d’action sociale bis, hébergeant des cours d’alphabétisation et de cuisine, des projections de film, des soirées apéro et un atelier de réparation de vélo.
Bien entendu, la FFtri a immédiatement introduit des recours pour expulser l’Attiéké. Elle est dans son droit. L’issue ne fait aucun doute. Elle va gagner, mais quand ? Les délais de procédure se comptent en mois, les appels sont suspensifs, il faut compter avec la trêve hivernale… Les squatteurs jouent la montre avec succès. C’est seulement le 17 août 2017 que l’Attiéké est mis dehors.
Pour la FFtri, le pire reste à venir. Dans un communiqué, les animateurs du squat dionysien le décrivaient comme « une joyeuse brèche dans cette période ultra-réactionnaire et répressive ». Concrètement, « les squatteurs ont laissé derrière eux un bâtiment dans un état épouvantable, explique un cadre de la fédération. Il a fallu évacuer des tonnes d’immondices et remettre pratiquement les locaux à nu pour tout refaire ». Le chantier est si considérable que la FFTri va renoncer à déménager. Pour elle, l’addition de cette expérience amère se chiffre en centaines de milliers d’euros. Acheté 1,16 million d’euros en 2012, le 31, rue Marcel-Sembat a été revendu, cinq ans plus tard, pour 905 000 € seulement, après que son propriétaire a supporté, pendant plus de quatre années, des mensualités d’emprunt, des taxes foncières, des frais de gardiennage et des frais d’avocats.