Le net envol d’une partie des élèves vers le privé met à l’épreuve le tissu social de la ville d’Ivry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne, aux prises avec ses idéaux de mixité.
L’indice de positionnement social (IPS) permet de connaître la composition sociologique des établissements scolaires.
IPS des collèges de France métropolitaine education.gouv.fr
« Bonjour monsieur ! » salue un passant, pour la quatrième fois en quinze minutes. Jean-Michel Gouézou nous avait prévenus. Trois décennies qu’il œuvre, comme surveillant puis comme CPE, au collège de quartier : impossible de sortir dans les rues d’Ivry-sur-Seine sans se faire alpaguer par des élèves « ou par leurs parents, qui étaient déjà mes élèves. Ça ne nous rajeunit pas ! »
Dans la promenade des Petits-Bois, le parc qui surplombe le collège Henri-Wallon, des ados s’entrecroisent d’un pas pressé. La plupart vivent dans la cité Pierre-et-Marie-Curie, qui domine les hauteurs d’Ivry, sur d’anciennes carrières. Mais ceux qui nous intéressent sont invisibles. Ceux qui s’évaporent des listes de la rentrée, balayés par l’« évitement scolaire », ce sport national qui consiste à contourner l’assignation de sa progéniture à l’établissement de secteur. Longtemps taboue, cette transhumance a été rendue visible par l’indice de positionnement social (IPS) des établissements d’Ivry, cet outil de mesure de la mixité scolaire qui dessine une véritable ségrégation par l’argent dans le sud-est de la capitale.
Alors que la moyenne nationale des IPS est à 104, les écoles primaires ivryennes oscillent entre 80 et 95. Les collèges de secteur accusent une baisse sensible : le collège Henri-Wallon plafonne à 87,7, le collège Georges-Politzer à 84. […]