Le financement de chantiers archéologiques à Rome par Bakou fait planer le doute sur la liberté de parole du pape au sujet du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
« J’ai été très déçu de la réaction vaticane. » Au cours d’une table ronde en ligne organisée par le Fonds arménien de France, le 18 novembre 2022, Sylvain Tesson révèle avoir accompagné Emmanuel Macron lors de sa dernière visite au Vatican, quelques semaines auparavant. L’écrivain voyageur, qui a raconté dans Éloge de l’énergie vagabonde (Pocket, 2009) ses périples dans le Caucase, ne fait pas mystère de son amitié pour les Arméniens. Il a donc saisi l’occasion de demander au pape François et à Paul Gallagher, ministre des Affaires étrangères du Saint-Siège, pourquoi le Vatican ne s’engageait pas davantage publiquement aux côtés de l’Arménie, premier État chrétien du monde, dans le conflit qui l’oppose à l’Azerbaïdjan.
« L’un m’a opposé un air tout à fait consterné, et l’autre une fin de non-recevoir extrêmement brutale, au nom du fait que ce n’était pas les affaires du Vatican que de s’occuper de dénoncer les agresseurs », s’étonne Sylvain Tesson, tout en ironisant : « J’ai vraiment eu l’impression de demander si je pouvais faire pipi sur le tabernacle… Peut-être que je n’ai pas été éduqué aux subtilités de la diplomatie vaticane ! »
L’écrivain rapportait à Rome un reproche persistant au sein de la diaspora arménienne en Occident. Lors de l’invasion du Haut-Karabakh par les forces de Bakou, le 27 septembre 2020, le pape François s’est limité à souhaiter le retour à la paix, en des termes neutres, caractéristiques du langage pontifical en situation de guerre : « Je prie pour la paix dans le Caucase et j’appelle les parties au conflit à faire des gestes concrets de bonne volonté et de fraternité qui peuvent conduire à la résolution des problèmes (…) par le dialogue et la négociation. » Tout au long du conflit, il s’est abstenu de désigner l’Azerbaïdjan comme agresseur, donnant l’impression de renvoyer les deux parties dos à dos.
(Merci à Gauthier)