25/01/2023
Question du 10 mai 2022 de l’eurodéputé Jean-Paul Garraud (RN/ID) à la Commission européenne :
Depuis près de deux ans, Frontex, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes et son directeur exécutif, Fabrice Leggeri, font face à de multiples accusations de la part d’ONG, de médias et de la Commission.
Ces attaques, additionnées au rapport de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), ont donc poussé M. Leggeri à la démission le 28 avril dernier.
Ce rapport secret de l’OLAF, puisque non rendu public, ferait ressortir plusieurs accusations, notamment un non-respect des procédures, un manque de loyauté envers l’Union européenne et une mauvaise gestion du personnel de l’agence.
Par ailleurs, sur la base d’accusations de refoulements de migrants formulées par certains médias, une enquête interne avait été diligentée en 2020. Les conclusions de celle-ci, présentées le 1er mars 2021, n’impliquaient pas les membres de l’agence européenne.
- La Commission peut-elle indiquer pour quelle raison le rapport de l’OLAF sur Frontex n’a pas été rendu public, alors que cette agence est financée par le contribuable européen?
- Compte-t-elle le rendre public et à quelle échéance?
- Peut-elle aussi préciser si la participation d’agents de Frontex à des opérations de refoulement est prouvée?
Réponse du 25 janvier 2023 (NFDS: 8,5 mois plus tard) de Ylva Johansson (S&D), Commissaire européennes aux Affaires intérieures :
1. La Commission fait observer que conformément à l’article 10 du règlement (UE, Euratom) nº 883/2013, les informations transmises ou obtenues par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) dans le cadre de ses enquêtes sont confidentielles. Conformément à l’article 17, paragraphe 4 bis, dudit règlement, une version expurgée du rapport final d’enquête a été fournie au Parlement européen aux fins de la procédure de décharge, de manière à garantir le respect des exigences en matière de protection des données et de confidentialité, comme indiqué dans la lettre envoyée par l’OLAF au président de la commission du contrôle budgétaire du Parlement européen le 10 juin 2022.
2. Les rapports finaux de l’OLAF sont des documents soumis au régime d’accès du public aux documents prévu par le règlement (CE) nº 1049/2001. Plusieurs demandes d’accès public au rapport final sont actuellement examinées par l’OLAF conformément audit règlement, tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union européenne, et aux délais fixés par ledit règlement.
3. À la connaissance de la Commission, à ce jour, aucune des enquêtes administratives telles que celles menées par le conseil d’administration de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) et par le groupe de travail sur le contrôle de Frontex n’a trouvé d’éléments de preuve de la participation de membres du personnel de Frontex à des opérations de refoulement. L’enquête de l’OLAF s’est concentrée sur des allégations de non-respect des règles et procédures internes.
29/07/2022
Un rapport de l’UE accable l’ancienne direction de Frontex (dont le chef était français) et sa pratique de refouler “illégalement” des migrants (MàJ)
Dans un rapport de l’OLAF, les enquêteurs accusent trois dirigeants placés à la tête de l’agence européenne d’avoir « basé leur décision sur des préjugés ».
C’est la chronique d’un naufrage. L’histoire d’une dissimulation à grande échelle perpétrée par trois fonctionnaires européens placés à la tête de Frontex : Fabrice Leggeri, son directeur, Thibauld de La Haye Jousselin, son bras droit, et le Belge Dirk Vanden Ryse, directeur de la division chargé de la surveillance des frontières. Les deux premiers ont été poussés à la démission. Le troisième est toujours en poste à Varsovie. Aucun des trois n’a donné suite aux demandes d’interview du Monde et de ses partenaires.
Tous les trois ont laissé leurs « opinions personnelles » interférer avec la conduite de Frontex, notent les enquêteurs l’Office européen de lutte antifraude (OLAF). Partisans d’une ligne dure en matière de gestion des frontières extérieures de l’Union européenne, ils ont enfermé l’agence dans un mensonge : les refoulements de migrants en mer Egée n’existent pas. Ils seraient une invention d’ONG « soutenues par les Turcs ». Une position proche de celle défendue par l’exécutif grec, mais aussi par l’extrême droite européenne.
Pour les enquêteurs, c’est la circulation de cette idée, empoisonnée, qui explique en partie la dérive de l’agence. Plusieurs mis en cause « ont basé leur décision sur des préjugés (…). Ils ont considéré que la Commission européenne était trop centrée sur les questions de droits de l’homme, écrivent-ils en guise de conclusion à leur rapport de 129 pages. En agissant ainsi, ils ont rendu impossible pour l’agence de répondre à ses responsabilités. » « Le contexte géopolitique, qui prévalait à l’époque, a affecté ma perception des situations opérationnelles », s’est défendu Fabrice Leggeri, face aux fonctionnaires européens, à propos de l’une des situations litigieuse identifiées par l’OLAF.
17/06/2022
Après une audition à huis clos au Sénat, Fabrice Leggeri est revenu sur sa démission de son poste de directeur exécutif de Frontex. Il estime que « certains » veulent faire jouer à Frontex le rôle d’une agence « qui vérifie comment les Etats-membres appliquent les droits fondamentaux », alors que son « mandat » est d’être « une force de police des frontières. »
(…) Fabrice Leggeri a en effet démissionné à la suite d’une enquête de l’Office de lutte antifraude à propos de cas présumés illégaux de « pushback » (refoulements) de migrants, notamment en mer Egée. À la suite de ces incidents, des députés européens avaient demandé le gel d’une partie du budget 2022 de Frontex tant que l’agence ne recrutait pas 20 officiers aux droits fondamentaux. De son côté, Fabrice Leggeri avait écrit dans son courrier de démission que « le mandat de Frontex […] a silencieusement, mais effectivement été modifié. »
« Le mandat de Frontex, c’est d’être une force de police des frontières européennes »
(…) Fabrice Leggeri fait de ce « rapport OLAF » un élément qui l’a « convaincu que certains faisaient une autre interprétation du mandat de l’agence. » L’ancien directeur exécutif de Frontex semble opposer une conception « policière » de Frontex à une conception « humanitaire » : « Le mandat de l’agence dans laquelle je suis entré comme directeur exécutif en 2015, c’est d’être une force de police des frontières européennes, qui soutient les Etats-membres dans le contrôle des frontières. […] Certains estiment que le rôle de l’Agence est d’être un organe qui vérifie comment les Etats membres appliquent les droits fondamentaux aux frontières. »
Fabrice Leggeri y voit un « problème culturel » d’une agence Frontex « qui n’est pas au clair sur ce qu’elle est » : « Certains auraient voulu en faire plutôt une agence qui s’occupe davantage de surveiller les Etats-membres dans les droits fondamentaux ou une agence humanitaire. Mais le rôle de cette Agence tel que le législateur européen l’a voulu c’est quand même plutôt de faire la police des frontières des Etats. C’est plutôt une agence qui ressemble à une agence de police. » Le résultat de ce que l’ancien directeur-exécutif de Frontex considère comme une confusion, c’est « une situation où il considérait que politiquement, il ne m’était plus possible de diriger l’agence. »
(Merci à BB)
04/05/22
FIGAROVOX/ENTRETIEN – Le directeur général de Frontex, Fabrice Leggeri, a présenté sa démission vendredi 29 avril. Pour le directeur général de l’institut Thomas More Jean-Thomas Lesueur, l’agence européenne est au cœur d’une bataille idéologique, qui a empêché le Français de réaliser sa mission.
Jean-Thomas Lesueur, est directeur général de l’institut Thomas More.
LE FIGARO. – À la tête de l’agence Frontex depuis 2015, reconduit en 2019, le Français Fabrice Leggeri a quitté ses fonctions de directeur exécutif vendredi. Que vous inspire cette démission ?
Jean-Thomas LESUEUR. – Cette démission est l’épilogue d’une sourde bataille qui se mène dans la coulisse des institutions européennes sur la mission de l’agence Frontex et plus globalement sur le sens à donner à la politique migratoire européenne. D’un côté, Fabrice Leggeri et la direction de Frontex qui rappelaient sans cesse que le mandat de l’agence était la garde de la frontière commune. De l’autre, Ylva Johansson, commissaire européen aux Affaires intérieures, qui exerce la tutelle sur Frontex, alignée sur les ONG, qui voudrait en quelque sorte transformer Frontex en agence de surveillance du respect par les États membres des droits fondamentaux des migrants à leur arrivée. Concrètement, l’action de Fabrice Leggeri était entravée depuis des mois par les initiatives de l’«officier aux droits fondamentaux» présent au sein de l’agence pour garantir ces droits…
Au-delà du sort personnel de Fabrice Leggeri, le fond de l’affaire est idéologique et politique, il faut bien le comprendre…
Jean-Thomas Lesueur
Fabrice Leggeri est depuis deux ans sous le feu des critiques d’une partie du Parlement européen, de la Commission, de certaines ONG et médias, mais aussi de quelques États membres, notamment la Suisse, où une votation est organisée le 15 mai portant sur la participation du pays à l’augmentation des moyens accordés à l’agence. En cause, des enquêtes faisant état de refoulements illégaux en mer Égée, contraires au droit de l’Union et au droit international. Ces critiques sont-elles justifiées ?
Cette accusation a été largement battue en brèche par les faits. Les enquêtes de différents organismes européens, comme le Parlement européen, l’OLAF (office européen de lutte antifraude, dont on se demande quelle compétence il a en la matière…) ou d’autres, soit ont conclu à l’absence de ces refoulements, soit ont minoré l’implication de Frontex. Ce sont les ONG no-borders et les médias (principalement allemands, comme Der Spiegel encore tout récemment) qui mènent la charge – complaisamment alimentés par la Turquie en témoignages ou en images satellite tendancieux… Au-delà du sort personnel de Fabrice Leggeri, le fond de l’affaire est idéologique et politique, il faut bien le comprendre…
Frontex est-il au cœur d’une bataille idéologique ?
Oui, très clairement. La manière de voir d’Ylva Johansson et de toute la Commission européenne prolonge en quelque sorte la vision de l’ONU dans son fameux rapport «Migration de remplacement: une solution au déclin et au vieillissement de la population ?», qui date de l’an 2000. Ce rapport, qui a fait couler tant d’encre, était pétri du dogme de la «mondialisation heureuse» qui régnait à l’époque. Le problème est que, vingt après, le bilan est pour le moins sombre. Ce dogme, qui voyait la personne humaine comme un agent économique interchangeable et déplaçable au gré des besoins de la mondialisation, ne résiste pas au spectacle de la fracturation de nos sociétés, de la montée du communautarisme et du racialisme, des phénomènes spectaculaires de violence ethniques que nous observons en Europe. C’est que le problème migratoire n’est pas une variable de la politique économique et sociale. C’est une question existentielle, je l’ai dit, en ce qu’elle touche à l’identité et à l’avenir des peuples et des cultures. Voilà ce qu’Ylva Johansson et la Commission européenne ne veulent pas voir.
(…)
29/04/22
Régulièrement accusé de fermer les yeux sur les refoulements illégaux de migrants en mer Égée, le patron français de l’agence européenne des garde-frontières Frontex, Fabrice Leggeri, a présenté sa démission vendredi. L’agence est depuis des années visée par différentes enquêtes d’ONG et de médias européens pour “violations des droits de l’Homme”.
Le directeur exécutif de l’agence européenne des garde-frontières Frontex, Fabrice Leggeri, a présenté vendredi 29 avril sa démission à la suite d’allégations de violations des droits de l’Homme contre son agence. En janvier 2021, l’Office européen de lutte anti-fraude (Olaf) avait ouvert une enquête contre Frontex, accusé d’avoir fermé les yeux sur le comportement des garde-côtes grecques qui participaient – et participent toujours, selon les ONG – aux refoulements illégaux d’embarcations de migrants vers la Turquie, en mer Égée. L’agence était aussi accusée de participer elle-même à ces “pushbacks”.
“Je peux confirmer qu’il a présenté sa démission” au conseil d’administration, et ceci “ouvre la possibilité d’un nouveau début” pour Frontex, a indiqué à Berlin un porte-parole du gouvernement allemand interrogé lors d’une conférence de presse. Cette proposition de démission, a poursuivi ce porte-parole, “donne la possibilité d’éclaircir entièrement les accusations pour faire la transparence et s’assurer que toutes les opérations de Frontex ont lieu dans le respect du droit européen”.