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ENQUÊTE – Attachés à l’enseignement public, incapables de faire le choix de l’enseignement privé, certains parents jouent avec les règles de la sectorisation que l’école publique leur impose pour concilier réussite de leurs enfants et convictions politiques.

Tous les matins Amandine (1), 49 ans, traverse Paris pour accompagner sa fille Coline, 10 ans, en classe. Trente minutes en métro en heure de pointe au lieu des cinq minutes à pied pour rejoindre l’école primaire publique de son secteur. En France, dans l’enseignement public, la carte scolaire affecte chaque élève dans une école proche de son domicile (sauf demande de dérogation). Pour Amandine, qui habite la Goutte d’Or, un quartier très populaire du 18e arrondissement, y scolariser sa fille était inenvisageable. En cause ? Un quartier trop «populaire» et un niveau scolaire bas selon la quadragénaire. «Je n’avais pas envie que ma fille régresse», affirme la mère. Cette dernière aurait pu choisir d’inscrire Coline dans une école privée afin de s’affranchir de cette sectorisation imposée, comme le font 17% des collégiens français (35% à Paris), d’après les chiffres du ministère de l’Éducation nationale. «Le privé coûte très cher sans la garantie d’un meilleur enseignement, alors j’ai préféré tricher pour que ma fille soit dans un bon public», confie Amandine. Elle a donc demandé à un ami de lui faire une attestation d’hébergement dans un quartier plus huppé.

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«Pour certains parents, il y a un véritable déchirement entre convictions politiques et réussite de leurs enfants. Certains d’entre eux, très attachés à la laïcité, ne peuvent se résoudre à envoyer leurs enfants dans l’enseignement privé catholique. L’État leur propose de choisir entre un ghetto de riches et un ghetto de pauvres, alors ils se retrouvent à trouver des moyens de contournement», analyse Julien Grenet, chercheur à l’École d’économie de Paris.

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Sujet tabou mais réel, la composition ethnique des collèges est aussi un facteur de fuite. Si Amandine, 49 ans, a donné une fausse adresse, c’était aussi pour éviter son école de secteur, essentiellement fréquentée par une minorité ethnique. «Je ne voulais pas que ma fille soit la seule blanche de sa classe», confie-t-elle. «La ségrégation ethnique est une réalité, surtout à Paris. Il suffit de se rendre à une sortie de classe dans une école du 18e arrondissement pour s’en rendre compte. À Barbès, on a le collège du coin avec 50% d’élèves défavorisés, tous noirs, et dans le collège plus prisé à 150 mètres, on y voit que des blancs. C’est un apartheid qui est une claque aux valeurs de la République», s’insurge le chercheur Julien Grenet.

Le Figaro Madame

Pour comprendre l’étendue du sujet (2011) :

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