ENTRETIEN – Dans son livre Le courage guidait leurs pas, l’ancien premier ministre rend hommage à des hommes politiques qui ont refusé la résignation en politique, de Clemenceau à Zelensky. Il appelle la classe politique à s’unir pour proposer une nouvelle donne en matière de politique migratoire.
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Vous-même, avez-vous manqué de courage sur cette question lorsque vous étiez à Matignon ou avez-vous été prisonnier de votre famille politique?
Manuel VALLS : Nous avons été plutôt réalistes: circulaire Valls de 2012 (toujours en vigueur), démantèlement des campements de Roms, réforme de l’Ofpra et de l’asile, gestion de la crise des réfugiés de 2015… Mais nous avons eu tort de ne plus considérer le séjour irrégulier comme un délit. Aujourd’hui, il faut un changement radical, loin de ces politiques au fil de l’eau. Tous les indicateurs le confirment. Il n’y a jamais eu autant d’immigrés dans notre pays. 10,2 % de la population. L’immigration est devenue le premier moteur de la croissance démographique en France. Le premier motif d’admission vient aujourd’hui du regroupement familial et du rapprochement de conjoints de Français. Mais le plus frappant pour moi est l’homogénéité des zones d’origine (plus de 40 % des immigrés arrivés en France en 2019 sont nés sur le continent africain) et la concentration géographique des populations immigrées pauvres. Nous avons créé des ghettos, gangrenés aussi par la violence et les trafics ; avec des chocs de culture considérables.
Pourtant la gauche peut aussi être synonyme de courage et même d’ordre, comme vous le montrez dans votre livre à travers la figure de Clemenceau, dont vous êtes un admirateur…
(…) Nous devons appuyer sur le bouton «stop», tout remettre à plat et arrêter l’immigration sans but. La priorité, c’est l’assimilation, pas l’immigration! Je suis un ferme partisan de l’assimilation à notre culture, à la laïcité, à l’égalité femmes-hommes, à nos valeurs, en passant évidemment par l’apprentissage de notre langue. Nous devons être bien plus exigeants dans ces domaines pour les naturalisations comme pour les titres de séjour. Je propose une autre politique de peuplement: pas plus de 40 % de logements sociaux dans une ville, pas plus de 30 % d’étrangers dans un quartier.
(…) Aujourd’hui, l’immigration économique n’est pas essentielle. Nous pouvons faire appel aux contrats saisonniers pour certains secteurs (agriculture…) ou métiers en tension et instaurer à terme des quotas. Il n’y a aucune raison par ailleurs que notre système social (asile, soins médicaux, hébergement…) soit le plus généreux d’Europe et donc le plus attractif. Le message doit être clair: la France change de politique d’immigration! Suivons l’exemple du Danemark. Cela est vrai également en matière de regroupement familial.