Lors de sa déposition à la barre de la cour d’assises des Alpes-Maritimes, l’expert « en traitement d’image » Jean-Pierre Stepanow, 76 ans, avait déclaré en tout simplicité : « Je vois ce que personne d’autre ne voit. » Les 7 et 8 juin derniers, ce retraité de la fonction publique hospitalière, devenu expert honoraire en traitement d’images auprès de la cour d’appel d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), avait formellement identifié sur une vidéo surveillance quatre malfaiteurs soupçonnés d’avoir agressé, en 2018, un couple de riches Lettons dans une luxueuse villa de Théoule (Alpes-Maritimes). Et ce, malgré la mauvaise qualité des images de la vidéo et la dissimulation par les malfaiteurs de leur visage.
[…] « Lors de sa déposition, il est apparu que le rapport de Monsieur Stepanow était particulièrement problématique en ce qu’il ne reposait sur aucune compétence ou expérience scientifique et qu’il comportait des affirmations fausses de nature à influencer les acteurs judiciaires chargés de cette affaire », relève l’avocat dans sa plainte dont nous avons pu prendre connaissance.Me Bouzrou s’appuie sur l’audition de l’intéressé, au cours de laquelle ce dernier a affirmé posséder une expérience de photographe de mariage et de cinéaste en matière médicale, ayant été agent polyvalent à l’hôpital une grande partie de sa carrière. De ses propres aveux, le septuagénaire aurait acquis des connaissances scientifiques au contact de médecins lorsqu’il prenait des « notes dans un petit carnet » au cours de leurs discussions. […]
Outre le défaut de formation et d’expérience, le conseil du plaignant Samir Zitouni dénonce la méthode utilisée par l’expert. Une « méthode » qui porte le propre nom de Stepanow et n’est utilisée que par lui, ne reposant sur aucun précepte scientifique et dont les seuls outils de travail sont : son oeil, le logiciel Photoshop, Internet et un livre intitulé « tête et cou » pour les notions anatomiques.
C’est sur cette base que, selon la plainte, « Monsieur Stepanow aurait réussi à identifier à partir d’une vidéo de mauvaise qualité quatre personnes d’origine maghrébine comme étant des malfaiteurs, décrits par les victimes et les gendarmes qui ont été à leur contact comme type caucasien/européen ».