Un an après Saint-Jean de Passy (Paris), c’est au tour de l’Institution Saint-Jean-Paul II, à Compiègne (Oise), d’être dans la tourmente. Le 9 juin, le rectorat d’Amiens a rendu un rapport sur ce collège-lycée privé sous contrat après les accusations de plusieurs professeurs. Ces derniers dénoncent l’interdiction du directeur Étienne Ancelin d’emmener les élèves voir les films Simone, le voyage du siècle, d’Olivier Dahan, et Rafiki, de Wanuri Kahiu. (…) Contacté par Famille Chrétienne, il a préféré ne pas faire de commentaire le temps de l’enquête judiciaire. Le 22 juin, malgré plusieurs tentatives d’apaisement au sein de l’équipe professorale, Étienne Ancelin a demandé sa retraite anticipée, laissant de nombreux parents et professeurs désarmés et inquiets pour l’avenir. Dans son rapport, le rectorat n’hésite pas à mettre en cause implicitement l’anthropologie chrétienne défendue par l’établissement catholique de l’Oise. Il note que, si les programmes sont « globalement respectés », « une partie des éducations transversales traitant des questions de société est abordée de manière inégale et incomplète, particulièrement sur l’éducation à la sexualité et sur les discriminations ». Malheureusement, le collège-lycée Jean-Paul II de Compiègne ne fait pas figure d’exception. Ces derniers temps, après certains cours d’histoire, de sciences ou d’éducation civique, d’autres directeurs d’établissements catholiques ont été accusés par des professeurs, des parents ou des élèves de propos jugés discriminatoires. Alors que le ministère de l’Éducation nationale augmente la pression sur l’enseignement privé, ces accusations sont-elles le symptôme d’une école où la liberté d’enseignement est menacée ?
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« Si ça continue, on ne pourra plus remplir notre mission d’anthropologie chrétienne. » Le directeur ajoute que de nombreux élèves et enseignants sont « désormais dans l’air du temps » et qu’il est difficile de « tenir le cœur de la vision catholique de l’enseignement ». Des préoccupations que partage cette directrice d’un autre établissement catholique, toujours dans la région parisienne, qui préfère garder l’anonymat. « Une de nos professeurs de SVT a été un peu chahutée cette année au moment de parler de la reproduction. On assiste à des prises de position très fermes sur la dysphorie de genre, remettant en cause l’idée qu’on essaie, nous, de transmettre, qu’homme et femme sont pleinement différents et complémentaires. » Pour éviter ce type de conflits ou discussions animées, certains établissements font le choix du dialogue en amont. C’est le cas au groupe scolaire Jeanne-d’Arc-Assomption, à Pessac (Gironde). « C’est un sujet qui nous interpelle beaucoup, explique Pierre Landèche, le directeur. On en a très rapidement discuté en conseil pastoral pour trouver les meilleurs outils pour aider les élèves. » Depuis, une infirmière ainsi que des intervenants extérieurs spécialisés viennent parler de tout ce qui a trait à la sexualité, y compris des nouvelles questions militantes autour du changement de sexe et de la théorie du genre.
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Interrogé sur la liberté d’enseignement dans le privé, le directeur diocésain de l’Enseignement catholique de l’Oise, Pascal Leroy, estime que « la mise en œuvre du projet éducatif propre à l’Enseignement catholique n’est pas de plus en plus difficile à tenir ». Il ajoute que le caractère propre est « une richesse attendue qui contribue au service de la nation dans le respect de la dignité de chacun et pour le bien commun ». L’Enseignement catholique n’attire plus seulement pour son inspiration chrétienne mais aussi pour son excellence, notamment face au public dont, dit-on, la qualité de formation ne fait que baisser. Et Pierre-Henri Beugras, chef d’établissement à Villebon-sur-Yvette, de conclure : « À nous de tenir bon sur ce qui nous différencie. »
Ce que dit la loi : Le code de l’éducation stipule que « l’enseignement placé sous le régime du contrat est soumis au contrôle de l’État. L’établissement, tout en conservant son caractère propre, doit donner cet enseignement dans le respect total de la liberté de conscience. Tous les enfants, sans distinction d’origine, d’opinion ou de croyances, y ont accès ».