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Pierre Manent, né le 6 mai 1949 à Toulouse1, est un philosophe français. Normalien, agrégé de philosophie (1971), spécialisé en philosophie politique, il est d’abord l’assistant de Raymond Aron au Collège de France. Il a longtemps été directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et développe une œuvre philosophique dense, principalement influencée par les pensées thomiste et straussienne et la politique libérale.
Attachée à la démocratie libérale, sa philosophie est considérée comme un élément central de la redécouverte des libéraux français (dont Tocqueville) mais intègre également une critique d’ampleur de la logique des droits de l’homme et de la tentation de la dépolitisation des régimes contemporains.

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Le pape François l’a répété: il n’est pas venu en France, mais à Marseille. Les Français cependant ne doivent pas en être mortifiés, puisque, comme il l’a souligné, sa ferme résolution est de ne rendre visite à aucun «grand pays européen». Peu importe qu’il soit reçu avec empressement et chaleur par la première ministre et le président de la République française, qu’il soit protégé à chaque seconde par les policiers, gendarmes et militaires français, peu importe que par ailleurs la ville de Marseille soit aujourd’hui la ville de France la plus dépendante de la bonne volonté du gouvernement et des ressources de l’État, pour lui, cette nation, comme les autres nations européennes, ne saurait être l’objet de ses soins ni la destinataire de ses intentions, en ce qui le concerne elle n’existe pas. «Marseille et la Méditerranée», telle est la circonscription où se donne à connaître la vérité du monde présent, et où nous devons puiser les motifs principaux de nos actions.

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L’approche politique du pape François susciterait moins de réserves si elle ne s’accompagnait d’une perspective religieuse également partiale avec laquelle finalement elle se confond. Dans les années 1950, une partie de l’opinion catholique s’était convaincue que le prolétariat donnait le sens de l’histoire en train de se faire, qu’il devait être l’objet spécial de la charité chrétienne même lorsqu’il adhérait au mouvement communiste. Prendre part aux combats du prolétariat avait valeur rédemptrice. Nombre de chrétiens furent ainsi amenés à montrer une sympathie active non pas seulement pour le mouvement ouvrier, ce qui était parfaitement légitime, mais aussi pour le mouvement communiste et le régime communiste. Un phénomène analogue se produit aujourd’hui. Les migrants, comme jadis les prolétaires, sont pour certains chrétiens le lieu de la rencontre entre la terre et le ciel. Et de même que jadis on refusait de tenir compte du lien d’une partie des prolétaires avec le communisme, aujourd’hui on écarte comme une impiété de considérer le lien entre les migrations et l’islam. L’accueil inconditionnel des migrants devient le critère exclusif, en tout cas principal, d’une sincère foi chrétienne.

La «civilisation» que le pape François déclare possible et veut passionnément nous rendre désirable, concerne principalement les nations européennes. C’est elles qu’il invite à disparaître pour devenir meilleures. Ni la Chine, ni la Russie, ni l’Inde, ni les pays musulmans ne sont concernés par ses appels. C’est autour de la Méditerranée que le grand œuvre doit s’accomplir. Le raisonnement qui conduit à l’effacement des nations implique nécessairement aussi l’effacement de l’Église. Pourquoi celle-ci garderait-elle sa forme, son principe intérieur, ses sacrements, tous ces caractères qui la distinguent? Pourquoi rester dans l’Église quand celle-ci nous demande de nous fondre dans l’humanité?

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Le Figaro

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