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Jörg Kukies, le tout-puissant conseiller pour les affaires européennes et économiques du chancelier, s’est laissé dire qu’EDF aurait démarché des entreprises allemandes, les incitant à s’installer en France en leur proposant des contrats d’approvisionnement électrique de long terme à prix cassé. En somme, il s’est imaginé que la France, profitant de la faiblesse allemande du moment, poignardait son partenaire. Quand l’Élysée réalise à quel point l’entourage de Scholz est troublé, les proches de Macron prennent langue avec Luc Rémont, le patron d’EDF. Ce dernier tombe de sa chaise. Non seulement EDF n’a effectué aucune démarche en ce sens, mais l’entreprise publique française serait bien incapable de proposer des tarifs inférieurs de 5 à 7 fois le prix du marché. Et pour cause : EDF porte une dette de 64,5 milliards d’euros et la relance du parc nucléaire ainsi que le grand carénage ont un coût important qu’il va bien falloir financer…

Ce n’est pas la première fois que le conseiller de Scholz fait part de ses inquiétudes aux Français. En juin, Kukies était déjà obsédé par le tarif de l’Arenh (42 euros le MWh), à ses yeux trop bas. Il lui était insupportable que la dette d’EDF soit en quelque sorte payée par les Allemands. Il s’inquiétait du prix auquel la France allait facturer le nucléaire historique (le parc déjà installé). Il ressassait que
l’Allemagne avait besoin de dix ans pour revenir dans le jeu. Il lui paraissait inacceptable que la réforme du marché de l’électricité consacre l’avantage français. Rien à voir avec les arguments servis d’habitude par Robert Habeck sur la gestion des déchets nucléaires ou les risques, ou le retard français sur les énergies renouvelables. « Kukies raisonne comme si le tarif de l’Arenh allait être constant sur dix ans, c’est faux », s’insurge-t-on chez les Français.

Alexis Kohler, le secrétaire général de l’Élysée, comprend qu’il faut absolument faire redescendre la température et convaincre Berlin de la bonne foi française. Le 26 septembre, il s’envole pour Berlin et rencontre Jörg Kukies avec un message d’apaisement : non, la France ne cherche pas à désindustrialiser l’Allemagne. Certes, le nucléaire accorde un avantage compétitif à la France. On peut bien sûr considérer que la situation de la France s’est améliorée avec la réduction des impôts de production et constater que l’Hexagone, pour la quatrième année consécutive (selon le baromètre E & Y de l’attractivité en Europe), est le pays européen qui attire le plus les investissements étrangers en Europe. Mais de là à dire que la France déshabille la Ruhr, il y a encore du chemin !
Sauf que Kukies, l’ancien banquier de Goldman Sachs, a besoin d’en être mathématiquement convaincu. Alors, Kohler aligne les chiffres, les comparaisons réglementaires, les différentiels de salaires… (…) Alexis Kohler et son équipe ont souligné que le danger venait d’ailleurs : l’IRA américain, vaste aspirateur à entreprises, est plus sûrement en train de mettre en péril l’industrie allemande. Dans le secteur des semi-conducteurs, Intel a demandé à Berlin de s’aligner sur une proposition de subventions américaines. Et le gouvernement Scholz n’a pas hésité à débourser près de 10 milliards d’euros d’aides publiques afin de garantir le vaste projet de construction de deux « méga fabs » à Magdebourg, dans le Land allemand de Saxe-Anhalt…

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Le Point

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