ÉLÉMENTS : Le « made in France » a le vent en poupe, d’Arnaud Montebourg à Emmanuel Macron. On voit cependant au seul énoncé de ces noms, du moins à celui de Macron, que ce « made in France » est surtout un effet d’annonce. Comment faire du « made in France » quand on a délocalisé notre industrie et que cette même industrie repose sur des chaînes de fabrication souvent disséminées dans plusieurs pays ?
PAUL FARNET. Comme sur beaucoup de sujets, les solutions visant à encourager la fabrication française prennent la forme de subventions, de projets gouvernementaux, d’appel d’offres publics… sans s’attaquer à la racine de notre désindustrialisation, c’est-à-dire le différentiel immense entre le coût du travail en France et le coût du travail dans les pays en développement.
Bien sûr, la fabrication française c’est « LE » sujet économique dont tout le monde veut s’emparer, surtout après la COVID qui a mis à jour les immenses vulnérabilités liées à notre dépendance vis-à-vis des importations.
La route est très longue avant que la réindustrialisation ne soit autre chose qu’un rêve subventionné. Mais l’artisanat français regorge de savoir-faire. Il y a quasiment 200 000 artisans en France. Si demain, pour nos cadeaux de Noël, nous achetons français au lieu d’importer nos cadeaux à 79 % de l’étranger (chiffres de 2022), cela représente quasiment 13 milliards d’euros réinjectés dans l’économie réelle.
ÉLÉMENTS : Venons-en à Terre de France. Comment en vient-on à créer une marque patriote. Est-ce ainsi d’ailleurs que vous la définiriez ? Patriote, identitaire, enracinée ? Est-ce un choix militant, commercial, industriel ?
PAUL FARNET. Oui, nous avons en effet voulu créer la première marque patriote. C’est le terme qui nous définit le mieux pour plusieurs raisons. D’abord, parce que nous assumons ! Nous sommes l’anti-Sephora, l’anti-Slip Français. Nous voulons montrer qu’il est possible d’assumer des valeurs traditionnelles et d’avoir des clients fiers de porter nos articles.
Ensuite parce que tous les articles que nous proposons sont fabriqués en France. Et très peu de marques s’obligent à fabriquer l’ensemble de leur collection en France. Attention aux termes « marques françaises » ou « atelier français ». Cela ne signifie pas que les produits sont fabriqués en France. Il y a beaucoup d’abus sur le « made in France ».
Enfin parce que nous reversons 100 % de nos bénéfices à des agriculteurs en difficultés, des familles de militaires et des écoles rurales. C’est la vocation patriote et solidaire de notre entreprise.
Tout cela résulte d’un choix de valeurs que nous voulons défendre.
ÉLÉMENTS : Est-ce que le choix de se lancer dans le « Produire en France » s’apparente à un parcours du combattant ? Pour acheter la matière première, pour trouver des savoir-faire, pour résister à la concurrence étrangère ? Pour s’en tenir au secteur du vêtement – où Terre de France commence à avoir une grosse offre –, comment résister à la concurrence à bas coût d’Asie, de Turquie, des pays émergents ? Quel est le mode d’emploi du « Made in France » ?
PAUL FARNET. Il y a un an, avec Terre de France, nous avons décidé d’investir plus de 100 000 euros de notre poche, sans subvention, sans aides de l’État, pour créer un atelier de confection textile. Nous avons embauché six couturières et nous avons peu à peu mis en place une organisation qui nous permet de fabriquer des vêtements français à un prix raisonnable.
Un T-shirt fabriqué au Bengladesh, c’est environ 1,40 € HT.
Un T-shirt fabriqué en Chine, c’est environ 2,50 € HT.
Un T-shirt fabriqué au Maghreb, c’est environ 3,50 € HT.
Un T-shirt fabriqué au Portugal, c’est environ 5 € HT.
Un T-shirt fabriqué en France, c’est environ 15 € HT.
Est-ce réaliste de reconstruire une industrie textile dans ces conditions ?
Je pense que oui, pourvu que nous parvenions à constituer une communauté de clients patriotes qui acceptent d’acheter des produits qui dureront plus longtemps et via des circuits courts, pour éviter des intermédiaires entre l’industriel ou l’artisan et le client.
C’est comme ça que nous pouvons proposer des articles fabriqués en France avec un bon rapport qualité-prix.
ÉLÉMENTS : Le « Made in France » passe-t-il par le localisme et les réseaux courts ?
PAUL FARNET. Sans aucun doute. C’est pour cela que nous créons nous-mêmes la plupart de nos produits avec des artisans et nos propres couturières. Ainsi, il n’y a pas d’intermédiaire entre notre atelier et le client qui peut bénéficier d’un prix correct. Une boutique de vêtement en centre-ville a besoin de faire une marge de x3 sur ses prix d’achat. Aujourd’hui ce n’est pas viable pour du textile français, à moins d’être positionné sur de l’ultra-luxe.
Dans tous les secteurs, le circuit-court permet de trouver un rapport qualité-prix intéressant. Regarder autour de chez vous le nombre de fermes qui proposent de la vente en direct. C’est là que vous trouverez probablement le meilleur rapport qualité-prix.
ÉLÉMENTS : Comment vous faites-vous connaître ?
PAUL FARNET. Principalement via les médias et les personnalités patriotes qui retrouvent dans notre démarche les mêmes valeurs qu’ils défendent. Là encore, le cercle est vertueux : nous finançons des sportifs, des créateurs et des médias qui défendent les mêmes valeurs que nous.
ÉLÉMENTS : Que représente le logo sur vos polos et T-shirts ?
PAUL FARNET. Notre collection textile porte le nom d’Oriflamme. Cela fait référence à l’Oriflamme de Saint-Denis, la bannière des rois de France lorsqu’ils partaient en guerre. Cette coutume date de 1124, sous Louis VI Le Gros. Ça n’est pas un secret, nous sommes assez portés sur l’héritage médiéval de la France !
ÉLÉMENTS : Vous apprêtez à lancer le premier album d’Erga, « Âge d’or ». Pourquoi cette nouvelle aventure, Terre de France en label discographique ?
PAUL FARNET. La production de contenus culturels de qualité a été trop longtemps délaissée par la droite conservatrice. Avec la chanteuse Erga, nous allons sortir un album le 1er décembre qui présentera huit créations originales et huit reprises de chants traditionnels. Si le succès est au rendez-vous, nous essaierons de produire régulièrement de nouveaux contenus musicaux et audiovisuels. Pour nous soutenir dans ce projet : https://terredefrance.fr/pages/erga
ÉLÉMENTS : Vous avez évoqué Le Slip français. Cette marque, fabriquée en France, comme son nom l’indique, dit reverser 5 % de ses ventes à des associations pro-migrants. Ce qui est pour le moins curieux, comme si le « Made in France » devrait s’excuser d’être ce qu’il est… Vous, vous avez fait le choix de ne pas rémunérer les actionnaires, mais de reverser vos bénéfices. Sur quelles bases ? Terre de France ne serait donc pas une société commerciale comme les autres ?
PAUL FARNET. Oui, nous voulons aider ceux que l’État n’aidera pas. Nous voulons aider ceux qui servent la France en silence, dans le pays réel. Les agriculteurs, les militaires, les écoles rurales et traditionnelles. Jusqu’à présent, nous avons pu reverser près de 100 000 euros. C’est la vocation solidaire de notre entreprise et elle ne changera jamais.
ÉLÉMENTS : Vous avez écrit un roman d’anticipation, La Nouvelle Rome. Pourquoi ? Qu’est-ce ? Une utopie néorurale ? Un songe communautaire ? Le monde rêvé de demain ? Votre personnage, Paul, quasi homonyme, s’assume comme « réac ». Peut-on dire de lui qu’il rêve du monde d’avant, mais un monde d’avant réinventé dans le monde d’après ? À quoi ressemblerait un tel monde ?
PAUL FARNET. Disons, pour ne pas gâcher la surprise de ceux qui liront cette nouvelle, que c’est un rêve partagé par beaucoup d’entre nous. Reprendre la course de notre civilisation là où elle s’est arrêtée, entre la saignée de 14 et mai 68… Un maire, une petite ville du Lot, un groupe de volontaires talentueux, et des milliers de personnes qui rejoignent cette Nouvelle France, que nous appellerons Nouvelle Rome, car c’est l’un des berceaux de notre civilisation. Je n’en dis pas plus.