Par exemple, à Beauvais en mars, un vaste trafic de voitures volées est démantelé. Un policier adjoint supprimait leurs immatriculations des fichiers de police pour qu’elles soient légalement remises en circulation. Il y a une centaine de véhicules au total dont des voitures de luxe. Ce policier est suspecté d’avoir touché 600 euros par véhicule radié et d’avoir empoché en tout plus de 60 000 euros alors qu’un gendarme faisait également des consultations illégales de fichiers de police au profit du réseau démantelé.
Des données à haute valeur ajoutée
Ces fichiers sont au cœur de la corruption comme les fichiers d’immatriculation, du permis de conduire, des antécédents judiciaires ou des personnes recherchées. Il s’agit de données à haute valeur ajoutée. “Les richesses de l’administration, en France ou ailleurs, ce sont les bases de données, explique le commissaire Thomas de Ricolfis, numéro 3 de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), la police des polices, et ancien patron de l’office anticorruption. Donc on a les fichiers de police, les fichiers des impôts ou le casier judiciaire. Donc tout ça, ce sont des informations qui ont une très forte valeur pour les groupes criminels. Parce qu’à travers ces informations, ils peuvent savoir si on travaille sur eux, si on prépare des opérations sur eux ou s’ils font l’objet de recherches. C’est un peu comme un délit d’initié boursier.”
En octobre, deux policiers de la région parisienne ont été condamnés à de la prison avec sursis pour consultation illégale de fichier au profit d’un tiers. L’un d’eux a même géolocalisé une femme pour rendre service à un amoureux éconduit après avoir transmis un faux document au procureur… Cette corruption ne concerne pas que les policiers et gendarmes, loin de là et les exemples ne manquent pas. Un officier d’état civil qui délivre de faux certificats de naissance pour une filière de sans-papiers à Lille. Un fonctionnaire préfectoral à Bayonne qui manipule le fichier des permis de conduire en ajoutant des points. Une greffière à Saint-Nazaire qui est soupçonnée d’avoir transmis des informations à des trafiquants de drogue alors qu’elle travaillait pour un juge d’instruction.
Et même, cas extrêmes : les dockers du Havre qui aident à faire passer de la cocaïne avec la technique du “Rip-Off” : ouverture des containers pour récupérer la drogue avant de replacer un scellé contrefait. Ou encore un douanier de Roissy qui ferme les yeux sur au moins dix valises chargées de coke et 40 000 à 50 000 euros reçus par bagage.
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