Le conflit israélo-palestinien a fait réémerger un document vieux de plus de 20 ans: la «Lettre au peuple américain» de l’ex-chef d’Al-Qaida, dans laquelle il justifie les attentats du 11-Septembre 2001. Cette dernière est devenue virale sur TikTok
Over the past 24 hours, thousands of TikToks (at least) have been posted where people share how they just read Bin Laden’s infamous "Letter to America," in which he explained why he attacked the United States.
— Yashar Ali 🐘 (@yashar) November 16, 2023
The TikToks are from people of all ages, races, ethnicities, and… pic.twitter.com/EwjiGtFEE3
«J’ai ouvert les yeux», «je ne regarderai plus la vie de la même façon», «c’est la chose la plus folle que j’ai pu lire depuis longtemps». Certains utilisateurs de X et de TikTok semblent être en pleine crise existentielle à la lecture d’une lettre vieille de plus de 20 ans. Le document en question n’est rien d’autre qu’une justification des attentats du 11-Septembre 2001, pointant la responsabilité des Américains dans ce qui reste l’attentat le plus meurtrier perpétré sur le sol des Etats-Unis. L’auteur de ce pamphlet intitulé «Lettre au peuple américain»? Oussama Ben Laden, le commanditaire de ces mêmes attentats, ancien chef d’Al-Qaida, tué au Pakistan en 2011 par l’armée américaine.
Etape 1 : Des vidéos publiées la semaine dernière en lien avec le conflit entre le Hamas et Israël
Selon les volumes de recherche de Google Trends, le phénomène est resté marginal la semaine dernière.
Les premières vidéos publiées sur TikTok ont fait un parallèle entre la situation des Palestiniens aujourd’hui, en plein conflit entre le Hamas et Israël, et celle décrite il y a vingt ans par l’ancien leader d’Al-Qaida, tué en 2011 au Pakistan lors d’une opération autorisée par Barack Obama.
Etape 2 : Une influenceuse booste la lettre mardi
Mardi, une influenceuse lifestyle new-yorkaise, Lynette Adkins, qui comptait 177.000 followers mais a depuis effacé son compte, partage son avis dans une vidéo titrée « Je ne vais pas bien ». Elle appelle ses abonnés à aller lire la lettre, disant traverser une « crise existentielle ». La vidéo a été vue 1,6 million de fois. Le mimétisme viral fait effet, le sujet explose.
Etape 3 : « Le Guardian » supprime la traduction de la lettre mercredi
Source principale de cette redécouverte, le Guardian supprime sa traduction de la lettre. Sans surprise, l’effet « Streisand » – selon lequel toute tentative de censurer ou supprimer une information sur Internet la rend encore plus populaire – joue à plein. « Cette transcription publiée sur notre site Internet a été largement partagée sur les réseaux sociaux sans le contexte complet. Nous avons donc décidé de l’enlever et à la place de rediriger nos lecteurs vers l’article qui la contextualisait à l’origine », précise le journal.
Etape 4 : Un journaliste américain critique le phénomène (et le fait exploser)
Yashar Ali, journaliste américain suivi par plus de 700.0000 personnes sur X, dénonce le phénomène et partage une compilation des vidéos TikTok, notant qu’il en a vu « des milliers ». Selon ses recherches, de nombreux utilisateurs affirment que la lettre de Ben Laden « les a conduits à réévaluer leur perspective sur ce qui est souvent présenté comme du terrorisme, et qui peut être une forme de résistance légitime à un pouvoir hostile ». La vidéo de Yashar Ali est reprise partout. Le volume d’articles archivés par Google double dans la foulée.
Etape 5 : TikTok sévit jeudi et supprime les vidéos
« Les contenus faisant la promotion de cette lettre enfreignent clairement nos règles sur le soutien à toute forme de terrorisme », explique TikTok. La filiale internationale du groupe chinois Bytedance, qui possède un siège à Los Angeles et un à Singapour, efface la plupart des vidéos et des hashtags consacrés à la lettre de Ben Laden. Contrairement à ce qu’avancent des critiques de TikTok, il n’y a aucune preuve à l’heure actuelle que le phénomène viral ait été orchestré ou promu par l’entreprise. Les témoignages les plus populaires semblent venir de comptes authentiques existant de longue date.