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REPORTAGE – Après leur passage au sein du CRA de Bordeaux, où échouent les étrangers sans papiers sortis de prison, 70% des personnes retenues sont relâchées dans les rues faute d’identification, de l’obtention d’un laissez-passer ou de l’épuisement de leurs voies de recours.

Ils sont étrangers, en situation irrégulière en France et font l’objet d’une mesure d’éloignement du territoire provisoire ou définitive. À moins qu’ils soient fichés S et soupçonnés d’activités terroristes, le centre de rétention administrative (CRA) de Bordeaux dispose en théorie de 90 jours pour prouver leur identité, obtenir un laissez-passer diplomatique de leur pays d’origine et les renvoyer chez eux. Un laps de temps durant lequel les personnes retenues, accompagnées par La Cimade qui dispose d’un bureau sur place, exercent leurs droits de recours – qui doivent tous être épuisés pour organiser leur départ.

En pratique, les demandes de maintien au CRA après 60 jours de rétention sont rarement confirmées par les juges, assure une source interne. Et 70% des individus qui y passent sont automatiquement relâchés «dans la nature» à l’issue de ce délai, notamment faute de l’obtention d’un laissez-passer. Ils sont alors officiellement assignés à résidence. «Mais c’est du pipeau, parce qu’ils n’ont pas d’adresse», déplore un haut gradé. Côté police en effet, faire repartir l’un d’entre eux est une course contre la montre. «C’est à nous de prouver qu’un retenu est Algérien ou Marocain. Ils se disent toujours de nationalités compliquées à prouver comme Palestiniens par exemple, et ensuite, on doit encore obtenir leur laissez-passer et l’autorisation de les faire embarquer sur un vol», explique le commandant Jean-Noël Suberbere, répondant aux questions des députés du Rassemblement national, Edwige Diaz et Grégoire de Fournas, venus faire une visite inopinée au CRA, mardi.

On va me renvoyer à Oran (Algérie), vous savez qu’il y a la plage là-bas ? Je vais prendre un peu de vacances. Mais dans le mois, je reviens

Najadi B., une personne retenue au CRA de Bordeaux

Des personnes retenues sortis de prison

Ce mardi-là, en raison de travaux rénovation, 8 personnes occupent les cinq chambres de quatre places de la structure. Tous arrivent directement de Gradignan, après y avoir effectué une peine de prison. L’un d’entre eux est fiché S. Un autre était déjà là à la même saison l’an passé. «Wallah, c’est qui ?», lance un homme retenu à Edwige Diaz à son arrivée, en savourant son repas. Face à lui, la télévision diffuse des dessins animés. «J’aime ça beaucoup. On est des enfants nous», lance son comparse dans un Français approximatif. Malgré le ton jovial, la tension palpable. L’endroit est insalubre et sale et la promiscuité génère de nombreux conflits. Sur les murs du réfectoire, un homme qui s’est scarifié a écrit son prénom avec son sang.

[…]

Le Figaro

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