Atlantico : Vous publiez un rapport de 47 pages dans lequel vous mettez en cause la neutralité et l’indépendance de Médecins Sans Frontières. Selon vous, une partie importante du personnel de MSF à Gaza partage les combats et a soutenu les attaques du 7 octobre. Comment en êtes-vous arrivé à cette conclusion ? Quels sont les éléments qui vous permettent de l’affirmer ?
Alain Destexhe : Le rapport est basé sur deux éléments : d’abord, les tweets officiels de l’organisation de Médecins Sans Frontières (MSF) et ensuite l’analyse d’une centaine de comptes Facebook d’employés de MSF à Gaza. En recoupant ces deux sources, on voit plusieurs choses.
On voit d’abord qu’une partie tout à fait significative des employés de MSF à Gaza se sont réjouis ouvertement de l’attaque du 7 octobre. Depuis le début, MSF a choisi de cibler Israël en ne condamnant pas les attaques du Hamas – donc les atrocités du 7 octobre – l’utilisation des hôpitaux comme boucliers humains par le Hamas, etc. Or MSF est présent avec 300 personnes à Gaza. Il est un acteur de premier plan. Il ne peut pas ignorer ce que fait le Hamas à Gaza. Ils ont d’ailleurs repris la fake news de l’attaque israélienne sur l’hôpital Ahli Arab. Ils ont affirmé à ce moment-là que des centaines de personnes avaient été tuées, en se contentant de répéter les chiffres des « autorités locales » , ont-ils dit. Or, il s’agit des chiffres du Hamas. Mais ils ne l’ont pas dit. Et par la suite, ils n’ont jamais reconnu leur responsabilité dans cette fake news. MSF avait repris les mots d’un médecin qui a affirmé que le plafond leur était tombé sur la tête.
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Avec ce rapport, que voulez-vous montrer ? Le but est d’alerter les autorités françaises ?
D’abord, alerter la presse, si vous voulez. Vu la notoriété de MSF détenteur du prix Nobel de la paix et comme il n’y a pas beaucoup de témoins présents à Gaza, la parole de MSF est prise pour argent comptant. Je vous ai donné l’exemple de ce médecin à l’hôpital Ahli Arab. Son témoignage n’est pas crédible. Autrement dit, la première chose que je veux faire avec ce rapport, c’est alerter sur le fait qu’il faut arrêter de prendre comme parole d’Evangile, si je puis dire, ce que dit MSF. Il faut vérifier ses sources et les recouper, faire un travail de journaliste en somme.
Le deuxième élément, c’est de reconnaître que MSF n’est pas neutre dans ce conflit et viole sa charte, elle viole sa neutralité, elle viole son impartialité, elle viole son indépendance. MSF est censée être neutre, impartiale et indépendante. Il peut y avoir une forme de complicité avec le Hamas si on prend en compte la communication de MSF depuis le 7 octobre.
Enfin, dernière chose, il serait intéressant et même indispensable concernant le sort des otages de savoir ce que le personnel de MSF à Al-Shifa savait exactement, à la fois de l’utilisation de l’hôpital comme structure militaire par le Hamas avant la guerre et pendant le conflit en lien avec la détention des otages.