Dans une tribune au « Monde », l’islamologue Rachid Benzine, né à Kénitra (Maroc), condamne la récente adoption de la loi « immigration » qui est à ses yeux une machine de guerre contre les migrants.
Du mardi 19 décembre, on retiendra la dignité d’Aurélien Rousseau, le ministre de la santé démissionnaire, et des vingt-sept députés de la majorité présidentielle qui ont refusé de voter un projet de loi sur immigration honteux. Car c’est bien un basculement historique qui s’est produit au Parlement.
Si, d’aventure, Marine Le Pen parvient au pouvoir suprême en 2027, elle n’aura pas besoin d’instaurer de nouvelles mesures de lutte contre les immigrés et contre toutes celles et tous ceux qui sont d’ascendance immigrée récente.
Préférence nationale en ce qui concerne les prestations sociales, barrages pour l’accès à la nationalité française de jeunes nés en France, exclusion des personnes sans titre de séjour des hébergements d’urgence et de l’aide médicale d’Etat, réintroduction du délit de séjour irrégulier, facilités ouvertes pour la déchéance de la nationalité, dynamitage des procédures d’appel en matière de droit d’asile : tout y est !
Quand la première ministre, Elisabeth Borne, évoque un « devoir accompli », alors que la majorité présidentielle et le gouvernement ont vendu leur âme, on croit rêver, et on ne sait si on doit se mettre en colère ou bien juger que tout cela est particulièrement pitoyable.
Il y a quelques jours, à la station de métro de la gare Saint-Lazare, on pouvait croiser deux jeunes policiers en fonction sur la voie publique. L’un était un homme noir avec une coiffure « afro » très sobre mais élégante, et l’autre manifestement d’origine maghrébine. Une belle image de l’intégration républicaine !
Mais, dans quelques mois, ces deux jeunes hommes vont devoir, sur instruction du ministre de l’intérieur, activement contrôler, évidemment « au faciès », d’autres jeunes Noirs, d’autres jeunes Maghrébins, et les interpeller, les conduire en cellule, si ceux-ci s’avèrent être en situation de séjour irrégulier. Pourront-ils, dès lors, se sentir longtemps respectables à leurs propres yeux, échapper à leur conscience ? […]