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Le coup de filet devait ramener 15 précieux et bienvenus trophées dans la corbeille de la lutte antidrogue. Ce devait être un coup d’éclat. C’est un coup de tonnerre pour la police. Car plusieurs éléments accréditent l’hypothèse d’une fuite au sein même des forces de l’ordre : la police avait repéré des véhicules tournant près des lieux d’interpellation, et sur le parking du briefing dès 5 h 30… dont un véhicule sur lequel les policiers avaient posé une balise GPS pour l’enquête ! 5 h 30, c’est précisément l’heure qui avait été fixée dans une note interne de la police transmise à plusieurs services, avant d’être modifiée pour un motif opérationnel, quelques heures seulement avant le coup de filet. Pour des raisons de discrétion et d’efficacité, le briefing et le rassemblement des forces n’avaient pas été organisés au commissariat central, ni à proximité du Blosne, mais sur ce parking en périphérie ouest. En clair : pas de hasard possible, les malfrats ne pouvaient être que renseignés, et même très bien renseignés. « Cela ne peut venir que de chez nous », convient une source policière.

S’agit-il d’une regrettable indiscrétion ou, plus grave encore, les trafiquants disposent-ils d’une taupe au sein même des forces de l’ordre ? « Il faut rester extrêmement prudent à ce sujet », met en garde la même source. Le parquet de Rennes annonce la rapide ouverture d’une enquête, confiée à l’Inspection générale de la police (IGPN), « afin de rechercher les raisons de ce dysfonctionnement inadmissible et identifier les éventuels auteurs d’une violation du secret de l’instruction ». Dans la ligne de mire de la police des polices : au moins 200 suspects…

Autre suspect : la réforme de la police

Au-delà de l’hypothèse d’une taupe des trafiquants au sein même des forces de l’ordre, c’est tout le nouveau modèle départemental issu de la très contestée réforme de la police, entrée en vigueur le 1er janvier dernier, qui fait également figure de suspect. Avant la réforme, la PJ était autonome. Depuis le 1er janvier, avec un objectif présenté de mutualisation et d’efficacité policières, elle est placée sous l’autorité d’un directeur départemental ou interdépartemental de la police nationale, qui dirige localement l’ensemble des services de police (sécurité publique, PJ, renseignement territorial…). Avec une information désormais nécessairement plus partagée, quand auparavant les opérations sensibles de la PJ restaient davantage cloisonnées, et donc plus discrètes.

Le Télégramme



En devinant les smartphones braqués sur eux derrière les vitres de l’Audi, les policiers ont compris que leur briefing nocturne, mardi 23 janvier, sur le parking du Castorama de Saint-Jacques-de-la-Lande (Ille-et-Vilaine) venait de prendre fin. Et que le vaste coup de filet prévu dans la foulée pour démanteler un point de deal du quartier du Blosne, haut lieu du trafic de stups de l’agglomération rennaise, avait échoué.

Le véhicule a roulé au pas, laissant le temps à ses occupants de filmer les combinaisons d’intervention sombres, les visages interdits des enquêteurs en civil et jusqu’aux colosses casqués de la « 82 », l’une des nouvelles « super CRS » spécialisées dans les opérations sensibles. Puis il a accéléré vers la sortie du parking, pour disparaître aussi furtivement qu’il était apparu. Les policiers se sont lancés à sa poursuite. En pure perte.

Neuf mois de filatures et d’écoutes partis en fumée en l’espace de quelques secondes ; quinze objectifs ciblés, parmi lesquels le « gratin » des trafiquants du Blosne, et pas un seul d’entre eux interpellé. Les enquêteurs de la police judiciaire (PJ) de Rennes, « littéralement écœurés », d’après une source judiciaire, fulminent : cette fois, les trafiquants semblaient particulièrement bien renseignés. (…)

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