23/05/24
22/05/24
(…) Selon les informations de BFMTV, au début du mois de novembre 2022, “la Mouche” a cherché à se procurer des armes de guerre auprès d’un mystérieux fournisseur avec lequel Il a négocié l’achat, pour 6.000 euros pièce, de fusils-mitrailleurs “tirant en mode rafale” : des “AR”. Un puissant fusil d’assaut similaire à l’une des armes utilisée par l’un des membres du commando, le 14 mai, lors de son évasion sanglante. (…)
Au mois d’octobre 2023, un magistrat évoque, pour la première fois, le terme de “clan Amra”, structuré autour de “la Mouche”, et fort d’”une vingtaine de membres”, selon une source proche de l’affaire. (…)
« Sur le Coran de La Mecque, Wallah, vous allez me respecter. Vous êtes des fous, mais je vais vous montrer que je suis plus fou que vous ! (…) Tu crois que je suis Coluche ? Vous vouliez voir ma chienneté (sic) ? Je vais vous montrer ! Tu vas me payer ! » L’homme qui s’exprime avec tant de hargne est un détenu de la prison de la Santé (Paris XIVe), numéro d’écrou 310460.
La scène est à peine croyable mais il dispose dans sa cellule d’un téléphone portable dernier cri pour gérer ses activités illicites du quotidien et même d’une Chicha pour égayer ses soirées. Mieux encore : il parvient à se faire livrer à toute heure du jour et de la nuit de la nourriture par l’intermédiaire de coursiers appelés « jeteurs », qui lancent des colis par-dessus les murs.
Pour parfaire son séjour carcéral, son réseau lui fournit aussi téléphones de rechange, cartes SIM, recharges de crédit mobile, cartes bancaires prépayées et même cannabis. Seule ombre au tableau, on lui refuse encore ses quatre demandes de parloir avec des jeunes femmes prêtes à avoir des relations sexuelles avec lui.
Pendant de long mois, la cellule de Mohamed Amra a fait l’objet d’une sonorisation dans le cadre d’une enquête sur le meurtre ultraviolent d’un homme à Marseille, qu’il est soupçonné d’avoir commandité depuis la prison de la Santé. Ces écoutes inédites, dont nous avons pris connaissance, révèlent à quel point Mohamed Amra était habité par un sentiment d’impunité et de toute-puissance.
Elles montrent aussi la diversité des activités criminelles qu’il continuait de poursuivre derrière les barreaux : trafic de stupéfiants à haut niveau, extorsions, enlèvements et séquestrations avec demande de rançon et surtout « carottages » : une technique consistant à dérober à des trafiquants rivaux leur marchandise en faisant semblant de nouer une transaction.
« Mohamed Amra se révèle capable d’une extrême duplicité, élevant la trahison au rang d’art, le tout en recourant fréquemment à la technique de l’enlèvement », relèvent les policiers de l’Office central contre la criminalité organisée (OCLCO) dans un document de synthèse. Des méthodes périlleuses qui font de Mohamed Amra un caïd particulièrement dangereux, disposant d’un solide réseau de recrues, fidèles ou terrorisées, prêtes à tout pour satisfaire ses ordres. Y compris organiser une évasion. Elles lui valent aussi d’avoir un certain nombre d’ennemis qui pourraient vouloir se venger (…)
Placé en garde à vue puis mis en examen pour « meurtre en bande organisée » le 26 septembre 2023, Mohamed Amra garde obstinément le silence. Mais les sonorisations de sa cellule, écoutée entre 2022 et 2023, se montrent parlantes. On y apprend que « La Mouche » ou « La Chemou » est considéré par ses codétenus comme « un mec en place », un « sistegros » (un grossiste) », un important trafiquant de stups. Il gère ses réseaux dans la région normande, notamment à Dreux, mais semble également avoir « un fort ancrage », selon les enquêteurs, avec la région de Marseille.
Il évoque ainsi sa connaissance d’alliés à la cité de la Paternelle, l’un des plus importants points de deals de la cité phocéenne, et même un contact en Colombie. Mohamed Amra semble s’adonner à la vente de cannabis, de cocaïne et même d’héroïne, « l’héro marron », précise-t-il.
Selon les écoutes, « La Mouche » fait usage de menaces, violences et sévices pour mettre au pas ses nombreux subordonnés et terroriser ses créanciers. « À 15h9 t’avais les affaires (les stupéfiants), dans tes mains et t’es parti ! Fils de p**** ! Pour faire Tourville/Elbeuf, trois stations-service en 1h09. Je vais te niquer ta mère ! Les 5 piliers de l’islam », vocifère-t-il au téléphone à l’encontre d’un travailleur coupable de s’être baladé avec une moto fournie pour les transactions.
Mais c’est surtout dans la trahison qu’il excelle. Dans plusieurs conversations captées par les enquêteurs, Mohamed Amra dirige, en temps réel et en images, des guets-apens à l’encontre de trafiquants rivaux pour leur voler leurs cargaisons de drogue. « Dis-leur qu’ils mettent les mains en l’air, fouillez toute la baraque, fouille d’abord, fouille, fouille, fouille. Mets la vidéo (…) », l’entend-on diriger lors d’une opération qui semble se dérouler à Bordeaux. Avant d’ordonner le rapt de l’un des trafiquants visés : « Dis-leur d’arrêter de crier ! Prends que le rebeu. Prenez-le et barrez-vous wesh, vous m’entendez là ? Prenez-le ce fils de p*** ». (…)