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Ce dimanche 23 juin, Emmanuel Macron rumine une nouvelle idée, enfermé, comme chaque week-end ou presque, dans la résidence de la Lanterne, à Versailles. Ceux qui l’ont croisé ces derniers jours le décrivent comme un lion en cage. Passé les grilles de l’ancien pavillon de chasse, sourd le rejet du président de la République. Pour espérer se faire réélire, lors des élections législatives des 30 juin et 7 juillet, les députés du camp présidentiel n’affichent plus le visage du chef de l’Etat sur leurs affiches de campagne. « Les gens te détestent », lui a confié, le 11 juin, l’ex-député Renaissance de l’Hérault Patrick Vignal, lorsque le président l’a appelé pour savoir comment était perçue, sur le terrain, sa décision, prise deux jours plus tôt, de dissoudre l’Assemblée nationale.« Emmanuel Macron est comme un artiste passé de mode », déplore l’élu d’Occitanie, jugeant cette disgrâce exagérée. Même si, à l’image de la plupart des députés, l’ancien socialiste ne comprend pas le choix présidentiel de la dissolution.
Emmanuel Macron se sait incompris. Il enregistre, le 21 juin, un podcast pour un site d’entrepreneurs, « Génération Do it Yourself », défendant pendant une heure et quarante-cinq minutes la rationalité de son action. Le chef de l’Etat fustige les programmes de ses adversaires, « les extrêmes », dit-il, visant le Rassemblement national (RN), aux portes du pouvoir, et le Nouveau Front populaire – alliance des partis de gauche. A ses yeux, ils mènent « à la guerre civile ». Un mot fort. Trop ? « No comment », soupire-t-on depuis le QG de campagne, rue du Rocher à Paris, où les interventions du président de la République sont jugées de plus en plus maladroites. « Il se croit dans une série télé ! », commentent, sur un marché parisien, des électeurs devant le candidat Horizons Pierre-Yves Bournazel. Une référence à La Fièvre, série diffusée sur Canal+ narrant la polarisation à outrance de la société, après un fait divers, entre droite identitaire et gauche décoloniale.
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Emmanuel Macron vante, depuis le 9 juin, une opération de clarification politique. « Les masques tombent, à commencer par le sien », approuve un ancien conseiller de l’Elysée. Deux jours après la dissolution, des élus du MoDem pleurent à chaudes larmes, d’autres expriment leur colère ou leur dégoût, lors d’une sorte de thérapie de groupe organisée en visioconférence par le patron du parti centriste, François Bayrou. Philippe Bolo, élu et réélu dans le Maine-et-Loire depuis 2017, manque de jeter l’éponge, en dépit de ses chances de victoire. « Je n’en peux plus, je n’ai plus la foi », lâche-t-il. « On me demande de remonter dans le train, mais je ne sais pas qui le conduit », s’inquiète Elodie Jacquier-Laforge (Isère). Après deux heures trente de réunion, François Bayrou se pose sur une banquette du bistrot parisien La Poule au pot avec une poignée de fidèles, « groggy », aux dires de l’un des convives.17:00