En 2003, une étudiante de 19 ans portait plainte contre le psychanalyste. Sans effet. Suite à notre enquête, elle dénonce aujourd’hui ce raté. Récit exclusif.
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La procédure a-t-elle été classée sans suite, et pourquoi ? Difficile de le dire : ni Vanessa ni son avocate n’ont retrouvé trace de sa plainte. Lorsqu’elles ont interrogé la petite caserne de gendarmerie des Yvelines, on leur a répondu que les locaux avaient subi une inondation dans les années qui ont suivi la plainte, provoquant la perte d’une partie des archives. Les parquets de Paris et de Versailles ne la retrouvent pas non plus, le dossier ayant pu être transféré d’un service de gendarmerie à un service de police sans qu’ils en soient informés. « Peut-être que, en 2003, face à cette situation où quelqu’un dépose plainte sans avoir été violé, certaines oreilles n’étaient pas aussi aiguisées qu’aujourd’hui sur les violences sexuelles », nous confie un magistrat. Un manquement extrêmement grave. Car d’autres femmes ont témoigné de viols ou d’agressions sexuelles que le psychanalyste aurait perpétrés après cette date, notamment en 2004, en 2014 et en 2020.
Gérard Miller a-t-il vraiment été appelé par la police, comme le fonctionnaire l’avait alors assuré à Vanessa au téléphone ? Fait troublant : à l’examen des 84 témoignages de femmes que nous avons collectés, le rythme des agressions présumées, nombreuses entre 2000 et 2003, semble avoir subitement ralenti après. Contactée, Louise Tort, l’avocate de Gérard Miller, nous a répondu que son client, qui bénéficie de la présomption d’innocence, réserve ses déclarations à l’institution judiciaire. Vanessa, elle, espère que, cette fois, justice sera faite. Elle a perdu de vue son amie, dont elle a tenté de retrouver le contact, sans succès, après la publication de nos enquêtes. Même s’il n’en subsiste aujourd’hui aucune mention, elle ne regrette pas d’avoir déposé plainte il y a vingt et un ans. « Ça m’a aidée à me construire et à passer à autre chose. Au moins, j’étais au clair avec moi-même. J’ai fait ce que j’avais à faire.»