Un désarroi et une réaction épidermique des habitants qui s’explique par la manière dont ce dossier a été géré, selon les élus d’opposition de la commune. D’après plusieurs témoignages, Nordine Guendez, le maire PS d’Ambarès-et-Lagrave, aurait soutenu durant des mois qu’il s’agissait d’une rumeur. «Le maire nous a fait débattre sur le sujet en conseil municipal sans nous annoncer auparavant qu’un permis de construire avait été déposé le 8 août», atteste Stéphane Maveyraud. Le conseiller municipal d’opposition, qui se définit comme centriste, désapprouve ce manque de transparence. «Là où on cache des choses, les gens pensent qu’il y a un loup. Je regrette la montée des haines qui empêche un débat constructif.» Une opinion partagée par David Poulain, membre d’un autre groupe d’opposition : «Le dossier est fait. Je reproche au maire ce mensonge qui a entraîné un clivage au sein de la ville.»
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Opacité
En revanche, élus et habitants s’interrogent sur ladite neutralité de leur maire sur ce volet. «Il s’est affiché pendant l’avant-dernière campagne législative du député Alain David avec l’association Millî Görüş, ce qui est gravissime», pointe ainsi David Poulain. La rencontre, attestée par un cliché publié le 4 juin 2022 sur la page Facebook de la Confédération islamique Millî Görüş de Latresne, circule dans la commune avec le lot de doutes qu’elle comporte. L’association d’obédience turque est en effet connue pour embrasser depuis une dizaine d’années la politique d’influence d’Erdogan, le chef d’État de la Turquie, qui invite la diaspora musulmane à se rendre la plus visible possible, et sur tous les plans, dans les pays européens.
Plusieurs élus s’inquiètent aussi des sources de financement de la très discrète association Ibn Sina, qui refuse systématiquement de répondre aux questions de la presse. En plus d’une cagnotte ouverte sur CotizUp, l’association a organisé une levée des fonds, le 8 juin dernier. «La soirée de gala avait pour invité d’honneur l’imam Abou Omar, ex-prédicateur controversé de la mosquée d’Argenteuil», s’inquiète l’élu municipal Éric Poret (RN), armé d’un flyer que nous avons pu consulter. Or selon un rapport de la commission d’enquête du Sénat publié en 2020, ce lieu de prières situé dans le Val-d’Oise a été identifié comme un fief salafiste. Interrogé, le maire de la commune affirme avoir demandé à la préfecture la Gironde une enquête sur l’honorabilité de l’association Ibn Sina. Sans réellement le confirmer, la préfecture indique «l’accompagner sur l’analyse du projet» et déclare que la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) «assistera la mairie pour s’assurer que toutes les préconisations légales sont bien respectées».