L’une de ses autres promesses, c’était celle d’une « société ouverte ». Le 1er avril 2017, il saluait Marseille ainsi : « Les Arméniens, les Comoriens, les Italiens, les Algériens, les Marocains, les Tunisiens, les Maliens, les Sénégalais, les Ivoiriens, j’en vois des tas d’autres, que je n’ai pas cités, mais je vois quoi ? Des Marseillais, je vois des Français ! » Alors, quand fin 2019, devant ses troupes, le président parle de l’immigration comme d’un « problème » et d’un « défi qui fait peur », beaucoup de ses soutiens se sentent floués. « On croirait revivre le film La Traversée de Paris, de Claude Autant-Lara, avec la fameuse réplique de Jean Gabin : “Salauds de pauvres” », lit-on dans une tribune publiée dans Le Monde. L’auteur n’est pas n’importe qui : l’historien François Dosse, le prof de Sciences Po du jeune Macron, l’homme qui l’a mis en relation avec le philosophe Paul Ricœur et qui, en 2017, avouait avoir pour lui « les yeux de Chimène ». En retour, il reçoit un courrier de sept pages à l’encre bleue d’un président furieux de cette « drôle de méthode ». Lui seul a le droit de trahir l’autre.
L’immigration, c’est le sujet sur lequel planchent Emmanuel Macron, Alexis Kohler et le ministre de la santé d’alors, Aurélien Rousseau, un jour d’automne 2023. Lors d’une réunion à l’Elysée, ils évoquent l’hôpital public et l’aide médicale d’Etat aux étrangers en situation irrégulière, que la droite veut supprimer.
« Le problème des urgences dans ce pays, c’est quec’est rempli de Mamadou,lance le chef de l’Etat.
– Non, ce n’est pas le premier problème de l’hôpital,nuance le ministre de la santé.
– Si, si. Vas-y, tu vas voir ! »
Comme souvent, Alexis Kohler tente de polir les certitudes présidentielles, mais pas assez pour éviter une dose de « préférence nationale » dans l’attribution des allocations familiales, avant la censure par le Conseil constitutionnel.
« Les Français ne veulent pas de la gauche »
Le 9 juin, lorsqu’il dissout l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron n’a pas compris que la gauche sociale-démocrate, qu’il avait détournée de son cours, va s’unir et revenir dans son lit d’origine. Le 7 juillet, les Français portent en tête des élections législatives les gauches alliées dans un Nouveau Front populaire. Mais pas question de donner trop d’importance à ces Lucie Castets, ces Marine Tondelier, ces « cocottes », comme il les appelle en petit comité. Fin août, le président livre son diagnostic au cours d’une réunion : « Les Français ne veulent pas de la gauche. » Pour lui, ils veulent moins d’écologie et moins d’immigrés.