En 1982, Jean-Marie Le Pen envoie une lettre au Président Mitterrand, demandant que le Front National soit représenté justement dans les médias. Le Président accepte, et met fin au « cordon sanitaire » historique. Selon le politologue Erwan Lecoeur : « Aujourd’hui, ce sont eux qui déterminent les sujets dont on va parler. Ils les imposent comme si c’était toujours les bons, et à l’inverse, il devient très difficile de parler d’autres sujets ».
Contrairement à la France, certains pays comme la Belgique, dans la partie francophone, maintiennent un « cordon sanitaire » médiatique face à l’extrême droite, ce qui semble efficace pour limiter sa progression électorale. « Dans le Nord néerlandais, où ce cordon n’est pas respecté, le pays est passé majoritairement à l’extrême droite », là où les scores en Wallonie restent très bas.
Tous les matins, les mêmes personnages se succèdent dans les matinales, sur les plateaux de télévision et de radio : Jean-Philippe Tanguy, Louis Aliot, Laurent Jacobelli… Des membres du Rassemblement national ultra-médiatisés, à qui l’on tend un micro à toute heure de la journée, comme leurs homologues des autres forces politiques. Omniprésente dans l’espace médiatique, l’extrême droite impose ses thèmes, ses idées, et profite de cette exposition pour engranger de nouvelles voix à chaque élection.
Pourtant, jusqu’aux années 80, il existait en France ce qu’on appelle un « cordon sanitaire » médiatique, estimant que les idées d’extrême droite ne pouvaient pas être traitées de la même façon que celles des autres partis politiques. Mais par à une intervention du Président de l’époque François Mitterrand, l’accueil dans les médias des dirigeants d’extrême droite et particulièrement de Jean-Marie Le Pen va changer, avec des conséquences qui nous suivent encore aujourd’hui. […]
Pour l’historien Christian Delporte, il est aujourd’hui impossible de stopper l’engrenage : « Lorsqu’on regarde les titres très complaisants qu’a pu faire une partie de la presse à la mort de Jean-Marie Le Pen, on voit que les rédactions tentent de ménager un lectorat potentiel. C’est le problème des médias généralistes, dans leur public, il y a forcément des soutiens des Le Pen ».
« C’est un choix de société, poursuit l’historien, d’assumer que certaines idées ne doivent pas se diffuser comme si elles étaient comme les autres ». La France a pris un autre chemin.